Nous étions quelques-uns, tels des Don Quichotte, à tenter de corriger une erreur régulièrement commise par des élus.
Non ! Le tourisme ne participe pas à hauteur de 30% à notre PIB !
Cela vient du fait qu’une maladresse de l’INSEE qui, dans ses analyses, compare le montant de la dépense touristique avec la valeur du PIB à tendance à induire en erreur la sphère politique.
Ce ratio [consommation touristique/PIB] est le plus usité pour estimer le poids du tourisme dans l’économie.
Il fournit une approche primaire et simple de l’importance de l’activité touristique dans l’économie, sans renseigner sur la nature des processus générateurs de la Valeur Ajoutée.
En somme si un peu comme si vous compariez votre revenu avec celui de votre collègue. Dire que son montant est 90% de celui du collègue ne veut pas dire que le revenu de ce dernier est composé à 90% du votre.
Dans un récent article publié sur son blog, l’INSEE vient justement de confirmer ce qui n’était qu’une approche de ce que représente le tourisme dans l’économie :
« Jusqu’ici, l’Insee mesurait uniquement la consommation des touristes, ce qui permettait d’appréhender ce que représente le tourisme dans l’économie française mais n’était pas suffisant pour évaluer sa part dans la création de richesse totale. Ce n’est que depuis avril 2023 qu’on dispose d’une mesure du produit intérieur brut (PIB) touristique français, grâce à un travail mené par l’Insee en cohérence avec les concepts et méthodes standardisés au plan international »
En effet, une évaluation de la consommation touristique peut permettre de calculer une valeur ajoutée mais elle n’est pas une valeur ajoutée !
Il est légitime de se poser que la question sur la pertinence d’une stratégie touristique quand des élus en responsabilité affirment que le tourisme représente 30% du PIB.
Cela a été le cas de Gilles Simeoni dans une interview accordée au Figaro (16/10/2020) et c’est également ce qu’indique l’agence de tourisme de la Corse (ATC) sur son site internet.
En fait, et c’est là le problème, nous n’avons que très peu d’études pour déterminer la richesse créée par le tourisme. Selon une étude (de 2011 !!), il créerait aux alentours de 7% des richesses insulaires. (hors location de résidences secondaires et transport aérien et maritime)
L’enjeu serait donc à la fois de faire en sorte que le tourisme puisse générer plus de richesse et que cette dernière bénéficie au plus grand nombre.
Or, la Corse ne s’est jamais dotée d’une structure permettant de calculer les données économique et d’en mesurer les évolutions. Et pour cause, cela permettrait de mesurer l’efficacité des politiques publiques.
On préfère donner dans la démagogie. Par exemple, la Présidente de l’ATC a annoncé, tout récemment, la suppression de la promotion de la Corse en juillet et en aout. Une annonce censée faire plaisir à ceux qui militent pour la mise en place de quota afin de préserver certains espaces remarquables en danger.
Notons que les nuitées de juillet et d’aout représentent 47,2% des nuitées annuelles et aucune étude ne vient expliquer comment la communication de l’ATC pèse sur cette prédominance de la période estivale.
Parallèlement, la nouvelle délégation de service public dans l’aérien portée par la majorité territoriale acte une augmentation du nombre de sièges dont une partie… en période estivale !
Enfin on imagine mal les sociétés de transport maritime Corsica Ferries ou Corsica Linea faire de la communication pour les périodes les moins attractives.
L’ATC ferait mieux se pencher sur 3 problématiques :
- Le transport et l’hébergement représentent 56,8% de la dépense touristique en Corse, contre 47.18 % en PACA et 42.18% en France de Province. C’est-à-dire qu’en posant un pied en Corse, les touristes ont déjà dépensé 56.8% de leur budget soit 10% de plus que celui qui débarque en PACA. En d’autres termes, pour une consommation identique (hors transport et hébergement) il nous faut plus de touristes.
- Si l’on se focalise sur l’hébergement, on constate que les résidences secondaires de vacances représentent en Corse 50% du poste hébergement en faisant jeu égal avec l’hébergement touristique marchand. En PACA il représente 46% et en France de Province 43.76%. Ajoutons que ces données n’intègrent que les locations déclarées.
- Le poste « musées, spectacles et autres activités culturelles » ne pèse que 0.15% de la consommation touristique soit 7 fois moins qu’en PACA ou dans la France de Province. Pourtant, notre culture est le marqueur que bon nombre d’élus veulent mettre en avant
En 2023, nous en sommes encore à débattre pour savoir si le tourisme c’est bien ou mal. Mais personne ne s’intéresse à la façon dont consomment les touristes. A tel point que les données les plus récentes ont…. 10 ans!!!
Chez nous, nous ne cessons de démontrer la loi dite de Brandolini (ou le principe d’asymétrie des baratins) selon laquelle « la quantité d’énergie nécessaire pour réfuter des sottises est beaucoup plus importante que celle nécessaire pour les produire »