La nouvelle tendance en politique repose sur un postulat tout simple : une personne sans crédibilité ne peut proposer que de mauvaises objections.
Il est donc beaucoup plus facile de s’en prendre au contradicteur qu’à la contradiction en elle-même.
C’est ainsi que le maire de Bastia n’hésite pas à qualifier le discours de l’opposition de schizophrène et reposant sur des fake-news (au passage, l’argument favori de Donald Trump).
Cela évite, par exemple, d’avoir à se donner la peine de chercher des arguments pour répondre aux objections portant sur le Plan Local de l’Habitat.
Cela dit, en procédant de la sorte, le Maire « de tous les Bastiais » renvoie 5 415 d’entre eux, qui ont choisi la principale liste d’opposition, à un vote…schizophrène.
Il oublie au passage que la démocratie n’est pas la dictature de la majorité et que recevoir les objections de l’opposition peut s’avérer être constructif.
Lors du dernier conseil municipal (16 juillet 2021) il a été soumis au vote des conseillers une révision des autorisations de programmes et des crédits de paiement. Cela constitue le plan pluriannuel d’investissement (PPI) qui dresse la liste de l’ensemble des projets programmés par la majorité municipale pour la ville, et des financements qui leurs sont attribués chaque année pendant une période donnée (en général 5 ans).
On se souvient d’ailleurs de la critique prononcée par la chambre régionale des comptes :
« La commune de Bastia s’est dotée en 2016 d’un plan pluriannuel d’investissement (PPI) retenant 56 actions et d’une capacité d’engagement de 90 millions d’euros sur la période 2016-2020. Problème, pointe le rapport, « à aucun moment le conseil municipal n’a été tenu informé de son avancement. »
En fait, une première version du PPI avait été portée à la connaissance du conseil municipal lors de la présentation du débat d’orientation budgétaire (5 mars 2021). Ce qui permet de faire une comparaison entre les deux versions du PPI.
Il faut savoir qu’un PPI se compose de l’ensemble des projets pour lequel une autorisation budgétaire a été votée. Il indique ce qui a été dépensé les années précédentes et indique les sommes qui vont être dépensées pour l’année en cours et les années suivantes.
Le PPI du DOB est sur 5 ans, celui de la révision sur 8 ans.


Des programmes qui apparaissent ou disparaissent…
Entre le PPI présenté pour la révision et celui du DOB 2021 4 mois se sont écoulés.
9 programmes font leur apparition pour un total de 5 932 297,63 €. Mais ce qui est étonnant c’est que 8 d’entre eux avaient pourtant fait l’objet de paiements lors des années précédentes pour un total de 2 734 255,81€ !!
A l’inverse, dans la révision, un programme disparait. Il s’agit de la « création de la maison des langues » pour 517 000 €

Des projets dont les montants votés varient !
Entre le PPI présenté dans le DOB 2021 en mars et celui de juillet, les montants de 17 programmes ont changé pour une variation totale de -2 522 133.73€

- Ainsi, entre les projets qui apparaissent, ceux qui disparaissent et les variations de montants entre mars et juillet, il y a une différence totale de +2 893 163,55€
Les montants de la part réalisée des projets varient aussi !
Qu’il puisse y avoir des différences sur les montants à venir, pourquoi pas ? Mais qu’il y ait un écart entre les financements déjà engagés…
Entre mars et juillet 2021, le montant des sommes déjà engagées avant 2021 varie pour un total de +2 926 888€ !!

Des crédits de paiement 2021 qui baissent de plus de 1 500 000€
Pour l’année 2021, 20 programmes voient leur crédit de paiement augmenter pour un total de 940 590,49€. Parmi eux 6 n’étaient pas inscrits au DOB 2021 présenté en mars 2021

Mais 12 programmes voient leur crédit de paiement baisser pour un total de 2 487 967,91€

Ce qui représente une baisse sur l’année 2021 de 1 547 299,2€ entre mars et juillet 2021
Conclusion
Il n’y a dans le fond rien d’illégal mais qu’en l’espace de 4 mois le plan pluriannuel d’investissement (PPI) puisse varier de manière aussi importante laisse dubitatif.
Le PPI est un outil de pilotage indispensable autant pour les élus que pour les cadres de la commune, il permet d’exprimer de manière exhaustive l’ensemble des projets et leur découpage dans le temps, en tenant compte des délais et de chaque étape de réalisation. Il permet surtout de savoir si le programme d’investissements d’une collectivité est compatible avec le maintien de ses grands équilibres financiers.
Force est de constater qu’en matière d’investissement et de financement la mairie de Bastia semble naviguer à vue.