Ami lecteur, voila longtemps que je t’ai délaissé. Bon, d’un autre coté, tu ne me paies pas donc… je fais un peu comme je veux ! Mais, si là, je ressens le besoin impérieux de revenir vers toi, c’est parce que j’étouffe ! Oui, carrément ! j’ai l’impression d’être enfermé dans une boite et que chaque respiration me coûte énormément comme si mes poumons se solidifiaient. Au bord de l’asphyxie.
A vrai dire j’ai cette sensation oppressante que nous sommes passés d’une société qui se proposait de répondre à nos désirs à une société qui veut que nos désirs correspondent à ce qu’elle a à nous offrir.
N’as-tu pas remarqué comme chacun de nos gestes est scruté, décortiqué? On veut faire de nous des cibles marketing dont la seule fonction est l’acte d’achat. Avec un argent que parfois nous n’avons même pas.
Nos rêves de grandeurs, nos espérances, nos ambitions viennent se fracasser devant l’image de l’être idéal auquel on nous impose de ressembler.
Nous voulions découvrir le monde, nous voulions changer le monde, nous voulions conquérir les étoiles. Et, aujourd’hui, tout cela se réduit à ce vague espoir de paraitre cet être idéal. Un être dont toutes les actions sont devenues des sources de profits.
Comme lui, il faut se doucher, se laver les dents, se raser, avec tel produit, s’habiller de telle façon, prendre tel café, avoir telle voiture assurée chez tel assureur, faire telles courses dans tel endroit, payer avec telle carte de crédit, se faire plaisir avec tel emprunt, boire telle boisson, courir avec telle chaussure en écoutant telle musique avec tel appareil, se coucher dans telle literie en prenant telle pilule pour réduire son tour de taille après avoir été au toilette en s’essuyant avec tel papier hygiénique. Et, on peut ainsi continue à l’infini.
Le paraitre heureux a pris définitivement le dessus sur le bonheur lui-même. A défaut d’être heureux, donne l’apparence que tu l’es. Tu dois écœurer ton voisin avec celle-ci afin que lui aussi se décide à paraitre plus heureux que toi. Et que vous vous acheviez à coup de crédits
Ces pseudos stars de la télé réalité rendent envieux le téléspectateur avec cette illusion de succès pourtant éphémère. Un succès jetable : les protagonistes suivants devant remplacer les précédents.
On crée des artistes éphémères plus faciles à manipuler et donc plus rentables. On nous impose telle musique à coup de matraquage. On crée du rêve jetable ou recyclable. La médiocrité devient un fond de commerce. La bêtise une valeur. Nabila, pseudo star d’un moment, rend faussement accessible le succès à la médiocrité.
On cultive cette médiocrité afin de rendre plus efficaces des publicités ventant les mérites de produits permettant de ressembler à ces stars jetables. Achète, achète, achète!
On devait rendre le monde meilleur, sauver des peuples, se battre pour la liberté et au final on se bat pour avoir son appartement. On se bat pour rembourser ses échéances d’emprunt. On croule sous les crédits pour ressembler à l’autre et l’on met toute nos forces à les rembourser.
Etre un homme, aujourd’hui, se réduit être capable de dépenser de l’argent. Et, toute notre vie nous courons après cet argent, comme les fourmis après les miettes.
Un esclave rêve de liberté, un esclave vit dans l’espoir de briser ses chaines, nous sommes des esclaves qui nous croyons libres. Nous avons abandonné toute idée de nous libérer.
Nous vivons une vie qu’on nous impose. Nous voulons être des personnes qui ne sont pas nous. On vit par procuration en nous enfermant de plus en plus dans un monde virtuel.
L’homme politique n’échappe pas à cette évolution. Il ne nous vend plus des projets de sociétés, des valeurs, une vision du monde, il gagne son élection en éructant des slogans. Du « je serai le président du pouvoir d’achat » de Sarkozy au « changement c’est maintenant » de Hollande.
On ne vote plus un homme pour ce qu’il est mais parce qu’il fait sien la problématique du moment. « La Fracture sociale », « l’insécurité », « le pouvoir d’achat », « le changement ». Il est si simple de dire ce que les gens veulent entendre plutôt que de convaincre L’homme politique se met à surfer sur des niches de populisme. C’est la faute du juif, du musulman, de l’étranger, du riche, du pauvre…. Au lieu de risquer la victoire en tentant d’imposer des valeurs qui élèvent la société, il descend dans le caniveau pour rafler le plus de voix possible.
A vrai dire, ce n’est pas le front national qui est devenu plus respectable, ce sont les autres partis qui ont perdu leur respectabilité.
D’ailleurs, les hommes politiques se mettent à fréquenter la télé-réalité pour élargir leur électorat. En effet, la chaîne de télévision D8 prépare une émission de télé-réalité plongeant nos élus dans la vie quotidienne des Français.
A ce rythme, bientôt, nous voterons par sms surtaxés pour élire le président de la République.
Tu connais, ami lecteur, cette phrase de Pagnol « si tous les cons dansaient, tu serais pas à l’orchestre ». Et, bien notre monde, c’est un peu le chef d’orchestre rejoignant les danseurs et laissant ce qu’il reste de l’orchestre se livrer à une joyeuse cacophonie !